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lundi 18 mars 2024

Baroque sicilien — L'église de San Benedetto à Catane et son escalier de l'Ange — 14 photos de Marco Pohle

Magnifique ouvrage du baroque sicilien, l'église Saint-Benoît (en italien : Chiesa di San Benedetto)  de Catane en Sicile e est située dans la via dei Crociferi, où elle a été construite entre 1704 et 1713. Elle est dédiée à saint Benoît de Nursie. Elle fait partie d’un complexe comprenant également la Badia Maggiore et la Badia Minore, reliées par un pont couvert sur la route.

Le bâtiment est célèbre surtout pour l'escalier de l'Ange, la Scalinata dell' Angelo, escalier avec une entrée de marbre, orné de statues représentant des anges. L'escalier est entouré par une belle grille en fer forgé. La porte d'entrée est en bois et les panneaux montrent des scènes de la vie de saint Benoît.

L'église fait partie du couvent des religieuses bénédictines. À l'intérieur, se trouvent des fresques de Sebastiano Lo Monaco, de Giovanni Tuccari et Matteo Desiderato. L'église possède une nef et est elle-même entièrement peinte avec des fresques illustrant la vie de saint Benoît. 















Photos © Marco Pohle


 

samedi 16 mars 2024

Le Musée civique Vicenzo Bellini à Catane. Présentation et parcours photographique.

" Dimanche matin, pour accompagner mon ami Mario Soldati de passage à Catane, je suis revenu visiter la maison natale de Vincenzo Bellini. [...] Après quelques raides escaliers, à travers une petite porte enchâssée dans un mur épais, nous entrâmes dans la première petite salle qui, bien que depuis tant d'années a été transformée en musée Bellinien, conserve toujours cet air intime de maison privée; nous avons l'impression de pénétrer dans un de ces appartements du vieux Catane encore habités par de petits employés. Dans la lumière calme et mélancolique qui provient des balcons qui donnent sur la rue Vittorio Emmanuele, les objets sont disposés avec soin dans les petites pièces. Voilà l'alcôve dans laquelle naquit Vincenzo. Aujourd'hui son clavecin la remplit presque entièrement. Le clavier de ce clavecin est encore recouvert comme si Bellini y avait à peine joué. Les petits objets personnels qui ont appartenu au jeune maître conservés derrière la vitre d'un écrin, dans cette lumière de maison catanaise, sont encore pleins d'intimité ". 

C'est de cette manière qu'Ercole Patti dans son Diario Siciliano (1971) décrit l'atmosphère familiale et un peu décadente qui flotte dans la maison-musée de Vincenzo Bellini. Le musée est abrité dans la maison natale du musicien catanais qui se trouve à l'intérieur du palais datant du XVIII siècle Gravina- Cruyllas, place S. Francesco; le musicien a vécu dans cette maison pendant seize années.

L'institution muséale a été inaugurée le 5 mai 1930 dans le but de recueillir et de conserver les reliques et les souvenirs de Bellini dans le cadre de l'aménagement artistique conçu par le premier directeur, le peintre Benedetto Condorelli. Outre les espaces d'exposition, le musée a également abrité, dès le début, une riche bibliothèque contenant des textes spécialisés sur la production lyrique de Bellini et sur l'histoire de la musique en général. L'aménagement ultérieur, au milieu des années 1990, a permis d'étendre l'exposition et de transférer la bibliothèque dans des salles situées au bel étage du même bâtiment. Après les récents travaux de rénovation, la maison natale de Bellini a fait l'objet d'un projet de fonctionnalisation et de rénovation des collections de Bellini, ainsi que des espaces du bel étage destinés à accueillir le musée multimédia de la musique de Bellini.

Le Musée virtuel de la musique de Bellini, baptisé "BellinInRete" adopte des stratégies de communication qui exploitent la technologie et le numérique. On peut s'y installer dans des loges d'opéra qui offrent une présentation scénographique et multimédia en grand format de l'histoire artistique et de la biographie de Vincenzo Bellini.

Source : Texte librement traduit à partir de textes de présentation du musée.

Parcours photographique


















Photos @ Marco Pohle (photos 4, 8, 10, 12 et 15) & Luc-Henri Roger (autres photos) 

Dans les couloirs du temps — La passagère de Mieczysław Weinberg à l'Opéra d'État de Bavière

Sophie Koch, extraordinaire Lisa

Soirée d'opéra bouleversante à la Bayerische Staatsoper pour la création munichoise de Die Passagierin (La passagère) de Mieczysław Weinberg, un opéra en deux actes, huit tableaux et un épilogue, inspiré du récit autobiographique éponyme Pasażerka (La passagère, 1962) de l'écrivaine et journaliste polonaise Zofia Posmysz (1923-2022),  résistante pendant la Seconde Guerre mondiale, et survivante des camps de concentration et d'extermination d'Auschwitz et de Ravensbrück, où elle fut détenue de 1942 à 1945. Zofia Posmysz est décédée en août 2022. Par le hasard des programmations, la production munichoise a lieu en même temps qu'une production madrilène de l'œuvre. Ce sont les deux premières auxquelles  l'autrice n'a pu assister. Elle était l'un des derniers témoins d'une époque aux horreurs innommables et avait marqué par sa présence la création de l'opéra en concert à Moscou en 2006, puis la création scénique au Festival de Bregenz en 2010. Elle put encore se rendre aux productions de Francfort, de Gelsenkirchen et de Graz, autant de lieux où l'histoire, inspirée de ses propres expériences autobiographiques, avait pu être jouée  "avec elle". 

Le livret de Medvedev est basé sur la pièce radiophonique polonaise de 1959 Pasażerka z kabiny 45 (Passager de la cabine numéro 45) de Zofia Posmysz, dont elle écrivit un scénario de film et le récit de 1962.  Pasażerka se base sur un événement autobiographique : lors d'un voyage officiel avec son mari à Paris en 1959, Posmysz avait entendu une femme parler en allemand à son enfant et avait supposé qu'il s'agissait de sa surveillante, la gardienne SS Anneliese Franz. 

Alexander Medvedev travailla pendant des années avec Chostakovitch et Weinberg. Cette alliance créative a donné naissance à quatre opéras de Weinberg sur des livrets de Medvedev (La Passagère, La Madone et le Soldat, Le Portrait, L'Idiot). D'abord écrit en russe, l'opéra  Пассажирка,Op. 97, prévu et déjà répété au Bolchoï en 1968, ne put y être joué, malgré l'intense plaidoyer de Chostakovitch, ami du compositeur, car la censure soviétique craignait les associations entre un camp de concentration et le goulag. On reprocha à l'œuvre son "humanisme abstrait". Ce n'est qu'en 2006 qu'il peut être créé par les musiciens du théâtre Stanislavski. Le livret russe de Medvedev a été retravaillé en 2010 pour la première représentation scénique de l'opéra au Festival de Bregenz en un texte polyglotte, surtout allemand et polonais, avec des passages en yiddish, français, russe et tchèque. 

Medvedev avait pris contact avec Zofia Posmysz afin de la rencontrer pour travailler sur le livret. Lors de leurs deux rencontres, dont la seconde eut lieu à Auschwitz,  il y eut des désaccords sur les transferts de contenu du récit au livret d'opéra. Tout au long de sa vie, Posmysz se distancia du livret de manière subtile. Elle déclara plus tard que, dans la version du texte de Medvedev, des " déclarations idéologiques ont été mises dans la bouche " de certains personnages, qui n'apparaissent d'ailleurs pas dans le livre. Selon Posmysz, Medvedev aurait argumenté à l'époque que certaines choses devaient avoir lieu dans le livret, d'une part pour des raisons de dramaturgie musicale, d'autre part pour que l'œuvre passe la censure.

La composition de Weinberg s'inscrit dans la tradition des " compositions commémoratives " pour les " victimes de la Grande Guerre Patriotique", qui évoquent musicalement les atrocités fascistes exploitées idéologiquement par le régime soviétique. C'était l'ère de Leonid I. Brejnev, secrétaire général du PCUS depuis 1964. Weinberg a tenté de manière très offensive de remplir sa " mission sociale " en formulant l'" éthique de son État ", à savoir l'invitation à ne pas oublier ces atrocités, comme " message artistique " de son opéra. Le livret et la composition opposent clairement les victimes et les bourreaux, alors que Posmysz évitait catégoriquement les délimitations moralisatrices.

Dans la production munichoise, Tobias Kratzer et Vladimir Jurovski se sont attachés à oblitérer ce qui pouvait l'être de cette l'allégeance soviétique forcée de Weinberg. Ainsi ont-ils fait passer à la trappe le personnage de Katia, une communiste russe défenderesse de l'idéologie des Soviets.


Synopsis

La Passagère de Munich aborde les questions de la mémoire et de la culpabilité dans une perspective contemporaine. L'intrigue de la Passagère comprend deux niveaux temporels : L'intrigue principale se déroule sur un bateau transatlantique vers 1959/60 ; des flash-backs conduisent au camp de concentration et d'extermination d'Auschwitz en 1943/44. À Munich, la mise en scène introduit un troisième niveau temporel situé dans le présent.

Premier acte. La traversée.

Lisa est passagère sur un bateau. Avec son mari Walter, diplomate allemand, elle traverse l’Atlantique. Tous deux sont heureux de pouvoir laisser derrière eux leur patrie, l’Allemagne, et donc le passé des années de guerre. L’émigration vers l’Amérique du Sud doit être le début d’une période de renouveau. Cependant, peu après le début du voyage, l’idylle conjugale prend déjà fin : Lisa croit reconnaître Marta, ancienne détenue du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz, dans la personne d’une passagère. Lisa était également à Auschwitz – en tant que membre de la SS et gardienne. Jusqu’à ce moment-là, Lisa avait caché à Walter ce qu’elle avait fait dans le camp de concentration. Le couple se dispute, — Walter voit sa carrière terminée si l'on apprend qu'il a épousé une femme SS —, mais se réconcilie lorsque les renseignements fournis par un steward les rassurent:  la femme mystérieuse, dans laquelle Lisa a cru reconnaître Marta, est britannique, et non polonaise. Pourtant, Lisa est de plus en plus rattrapée par ses souvenirs : de la gardienne en chef et des autres SS ; des détenues du camp, avec leurs histoires de souffrance et leurs espoirs ; mais surtout c'est le souvenir de Marta qui la hante. Les deux femmes partagent une histoire complexe de dépendance et d’oppression. Ce qui s’est passé entre elles rattrape Lisa. Une confrontation avec son passé devient inévitable.

Deuxième acte, Près de la mort.

La pensée de Lisa oscille entre ce qui se passe à bord et les souvenirs du camp de concentration : le commandant du camp d’Auschwitz souhaite que Tadeusz, musicien célèbre et également interné, lui joue sa valse préférée. Au cours des préparations du concert, Tadeusz retrouve pour la première fois sa fiancée Marta. Lisa leur accorde un moment de tête-à-tête interdit et exige de la gratitude pour ses faveurs. Elle propose d’organiser d’autres rendez-vous et veut ainsi devenir une sorte de protectrice de Marta et Tadeusz, qui doivent lui être entièrement soumis. Mais Tadeusz refuse ces rendez-vous illicites, qui pourraient conduire à l'exécution de Marta qu'il tente de protéger au prix de ne plus la revoir.
Pendant ce temps, les meurtres continuent : les détenues du camp opposent à la machine d’extermination d’Auschwitz des moments d’empathie mutuelle, mais elles ne peuvent pas échapper à la mort. La brutalité et la perfidie du camp s’imposent complètement à la conscience de Lisa.
Le steward doit revenir sur ses informations : la mystérieuse passagère est bien polonaise. Elle pourrait être Marta. Une soirée dansante à bord se confond avec le concert au camp : Tadeusz y commet un acte de résistance sous les yeux du commandant du camp. Au lieu de jouer la valse demandée, il se met à jouer la Chaconne de Jean-Sébastien Bach. Tadeusz est assassiné. Marta s’adresse à la postérité : « Si l'écho de leurs voix faiblit. » [Un vers de Paul Éluard].  Lisa n’obtient pas de rédemption.


La mise en scène 

Die Passagierin est le premier opéra que Tobias Kratzer, né en 1980 à Landshut, met en scène à l'opéra de Munich. Toutes les nouvelles productions qu'il a signées ces dernières années ont été réalisées avec la même équipe : Rainer Sellmaier, responsable des décors et des costumes, et Manuel Braun, responsable de la vidéo, avec en plus Jonas Dahl dans la nouvelle production. Il s'agit aussi du premier travail commun avec le directeur musical Vladimir Jurowski. 

Tobias Kratzer, qui prendra ses fonctions comme directeur général de l'opéra de Hambourg en 2025, livre ici un travail sobre et percutant sans introduire de références scéniques à l'univers concentrationnaire d'Auschwitz, ni dans les décors ni dans les costumes. 

Toute l'action se déroule dans le huis clos d'un paquebot reliant l'Europe au Brésil où le mari de Lisa se rend pour y représenter l'Allemagne en tant que diplomate. Du paquebot on ne verra que la découpe d'un flanc avec trois niveaux de cabines puis, en deuxième partie une vaste salle de restaurant avec une douzaine de grandes tables collectives. Quinze cabines avec balcon sont disposées sur trois niveaux superposés qui occupent tout le front de scène. Lisa et son mari occupent la cabine centrale. Les costumes des protagonistes et ceux du personnel, les cabines et leur mobilier évoquent la fin des années 1950. 

La mise en scène se concentre sur le travail sur la mémoire de Lisa, dont le déclencheur est sa présomption sur l'identité d'une autre passagère. À la fois, Lisa est projetée dans les couloirs du temps vers l'avenir : elle y est devenue une petite vieille craintive et terrorisée, porteuse d'une urne funéraire que l'on suppose contenir les cendres de son défunt mari qu'elle rapatrie en Allemagne. Lors de ce trajet de  retour, elle revoit dans un cauchemar éveillé les épisodes de la première traversée. La petite vieille hante le navire et les cabines des voyageurs sans que ses occupants ne l'aperçoivent. 

Une fois le germe du souvenir de son passé nazi à Auschwitz inoculé, il va conduire Lisa à la panique puis à l'aveu vis-à-vis d'un mari de plus en plus préoccupé. La mémoire en action va transformer le navire et ses occupants et faire jaillir des évocations du passé concentrationnaire avec au centre les personnages de Marta et de Tadeusz livrés aux persécutions de la gardienne Lisa. Dans le paquebot de la fin des années 50, le personnage de Lisa, joué par deux actrices, est ainsi détriplé : tortionnaire nazie, femme de diplomate, veuve de diplomate. Des passagères vêtues de noir incarnent les codétenues. Le capitaine du navire est  aussi le commandant du camp, le personnel du navire joue à la fois les garde-chiourme et dans le restaurant, les cadavres jonchent le sol et les tables. En fin d'opéra, des images des camps de la mort sont diffusées sur l'écran d'un téléviseur. 

La vieille Lisa — Sibylle Maria Dordel

Aux changements de tableaux un grand écran descend sur l'avant-scène avec l'image impassible des flots où descend le corps d'une femme, celui de la vieille Lisa, dont tout donne à penser qu'elle s'est suicidée. 

La direction d'acteur est extrêmement exigeante pour le personnage de Lisa qui doit donner à voir la transformation progressive d'une ravissante femme encore jeune promise à la vie brillante, toute en représentation, d'épouse de diplomate en une personne dont le vernis factice s'écaille pour dévoiler les abominations d'un passé pernicieux. L'aveu progressif au mari s'accompagnera de justifications fallacieuses. Dans les scènes du restaurant, c'est une femme hagarde, épuisée et vieillie qui de l'aveu privé passe à la confession publique. 

La mise en scène de Tobias Kratzer pétrifie. Elle est épurée, intelligente, lisible, rigoureuse, les trois niveaux temporels interfèrent sans provoquer de confusion aucune. Elle donne toute place à la musique, au texte et au chant, et à l'absolu de l'horreur qui jaillit en geyser des lugubres labyrinthes de la mémoire. C'est une extraordinaire réussite qu'on se retient dans un premier d'applaudir tant ce qui est représenté et suggéré est insoutenable. Tobias Kratzer laisse ouverte la question de savoir qui est la passagère : la passagère en qui Lisa croit reconnaître Marta, dont la présence réelle n'est jamais confirmée, ou Lisa qui traverse par deux fois l'Atlantique tout en voyageant sur les cordes temporelles. 

De la musique avant toute autre chose

Mieczysław Weinberg considérait La Passagère comme son Opus magnum, Sa musique se devait, censure oblige, illustrer la brutalité du régime nazi, la dynamique des différentes constellations de pouvoir et les souffrances des détenus. Il s'agissait de commémorer dans la composition les victimes de la Grande Guerre patriotique. Mais au-delà des impératifs musicaux catégoriques du régime, la partition recéle d'immenses richesses. Ainsi de la caractérisation du chant des personnages, plus doux et lyrique pour Tadeusz et Marta, plus sec et tranchant pour Walter et Lisa. Weinberg donne des formes déclamatives au chant de Walter, et récitatives à celui de Lisa. À ces deux personnages, il refuse d'attribuer un aria ou un duo intime. À Tadeusz et Lisa la douceur, le lyrisme et la sensibilité d'un chant qui par ailleurs les rapproche de celui des autres détenus, alors que Walter et Lisa sont exclus de toute communauté musicale. La partition regorge de citations, d'allusions et de clins d'œil musicaux : Chostakovitch bien sûr et Benjamin Britten, le jazz, la chanson folklorique du temps de la peste viennoise de 1679 Oh! Du lieber Augustin, une marche militaire de Schubert, le motif du destin de Beethoven, la chanson Surabaya Johnny de Bertolt Brecht et Kurt Weill, et la Chaconne de Bach que Tadeusz joue par défi alors que le commandant du camp lui a ordonné de jouer une valse, une protestation que le musicien payera de sa vie.

Vladimir Jurovski s'est attaché à rendre les beautés dramatiques et la force expressive de l'oeuvre de Weinberg avec l'exemplaire orchestre de Bavière. On perçoit chez Jurovski une profondeur de compréhension de cette composition que les Soviets n'ont pas su apprécier, nourrie par son origine russe et sa formation dans les meilleurs cénacles moscovites. Comme le chef l'a précisé lors d'un entretien, sa proximité avec l'opéra est aussi renforcée par sa propre tragédie familiale : son arrière-grand-père fut victime de la Shoah en septembre 1941, lors du massacre de Babi Yar au cours duquel les forces militaires de l'Allemagne nazie mitraillèrent 33741 Juifs à Kiev. 

Le choeur et le plateau de chanteurs participent de la même excellence. Le rôle de Lisa est interprété par Sophie Koch, qui a récemment incarné avec brio Gertrude dans Hamlet lors du dernier festival d'été munichois. Son jeu théâtral qui illustre le dépérissement physique et moral de la protagoniste laisse pantois. Elena Tsallagova illumine le tragique personnage de Marta de son prodigieux soprano lyrique. Le rôle de la vieille Lisa est tenu par l'actrice Sibylle Maria Dordel, qui se produit pour la première fois à l'Opéra national de Bavière. Charles Workman, que l'on avait beaucoup apprécié en Polonius dans Hamlet campe avec une voix magnifiquement projetée le rôle peu glorieux de Walter, le diplomate trompé par le mensonge par omission de Lisa, qui craint pour sa carrière. Venant lui aussi de l'équipe du Hamlet de Brett Dean où il était Horatio, Jacques Imbrailo donne ici un Tadeusz de grande sensibilité et de tout aussi grande abnégation. 

Au-delà de la porte étroite des contraintes de la censure soviétique, Mieczysław Weinberg est parvenu à approcher l'expression de l'innommable dans une des plus grandes oeuvres musicales de la Shoah. Son opéra, ressuscité en 2010, connaît un succès grandissant, la production de l'Opéra de Bavière lui rend un hommage éclatant. 

Distribution du 13 mars 2023

Direction musicale Vladimir Jurowski
Mise en scène Tobias Kratzer
Scène et costumes Rainer Sellmaier
Lumières Michael Bauer
Vidéo Manuel Braun et Jonas Dahl
Chœurs Christoph Heil
Dramaturgie Christopher Warmuth

Lisa Sophie Koch
La vieille Lisa Sibylle Maria Dordel
Walter Charles Workman
Marta Elena Tsallagova
Tadeusz Jacques Imbrailo
Krystina Daria Proszek
Vlasta Lotte Betts-Dean
Hannah Noa Beinart
Bronka Larissa Diadkova
Yvette Evgeniya Sotnikova
1er SS Bálint Szabó
2ème SS Roman Chabaranok
3ème SS Gideon Poppe
Passager âgé Martin Snell
Surveillante générale / Kapo Sophie Wendt
Steward Lukhanyo Bele

Orchestre de l'État de Bavière
Chœur de l'Opéra d'État de Bavière

Audio La première est actuellement disponible à l'écoute sur BR Klassik 

Programme La production s'accompagne d'un programme remarquable (en langue allemande) qui propose diverses études extrêmement bien documentées, dont nous avons entre autres extrait le synopsis.

Crédit des photos © Wilfried Hösl (photos de scène) et © Manuel Braun | Jonas Dahl (vidéo de la noyade )

 

jeudi 14 mars 2024

La Nativité du Caravage— Les copies du Castello Ursino de Catane et de l'Oratoire Saint-Laurent de Palerme

Copie de la « Nativité avec les saints Laurent et François d'Assise » de Michelangelo Merisi dit « Le Caravage » (1609), un tableau volé à Palerme en 1969 à l'Oratorio San Lorenzo et jamais retrouvé. La copie a été récemment restaurée. Le tableau est exposé au Castello Ursino de Catane. La copie fut réalisée en 1627 par Paolo Geraci. Il s'agit de la seule copie réalisée à partir de l'original. 

La réplique de Palerme a quant à elle été réalisée par Factum Arte, une société italo-espagnole spécialisée dans la reproduction d’œuvres d’art.

Copie par Paolo Geraci


Castello Ursino

La réplique de L'Oratorio San Lorenzo de Palerme


Photos in situ de Luc-Henri Roger

Richard Wagner et son buste au Grand Hôtel et Des Palmes de Palerme

Richard et Cosima Wagner résidèrent à l'Hôtel des Palmes de Palerme du 5 novembre 1881 au 1er février 1882. Il y occupa les chambres 24, 25 et 26. Aujourd'hui cet hôtel qui a connu des restructurations et des rénovations importantes se dénomme Grand Hôtel et Des Palmes. La Suite Présidentielle Wagner, de belle dimension (157 mètres carrés) a préservé le caractère de l'époque du compositeur. Elle contient encore le piano offert par Liszt, sur lequel Wagner travailla à l'orchestration de la partition de Parsifal, terminée le 13 janvier d'après le journal de Cosima. On peut la réserver si on a la poche bien garnie.



Un buste en bronze de Richard Wagner occupe la place d'honneur dans le grand hall d'entrée. La réception a eu la gentillesse de nous permettre de le photographier. 






À l'arrière du Grand Hôtel et des Palmes se trouve la rue Richard Wagner dans laquelle un autre hôtel, le Grand Hôtel Wagner, s'est ouvert en 2006 dans un palais du début du 20ème siècle entièrement rénové. De Wagner, cet hôtel de grand luxe ne porte que le nom, qu'il s'est sans doute attribué en raison de sa localisation.


Photos © Marco Pohle (photo 1) et Luc-Henri Roger (autres photos)

mercredi 13 mars 2024

Première mondiale du Berretto a sonagli de Marco Tutino en diptyque avec La Lupa au Teatro Massimo Bellini de Catane

Il beretto a sonagli. Ciampa chapitre Beatrice.

La création mondiale du Berretto a sonagli (Le bonnet à sonnailles / Le bonnet de fou) du compositeur milanais Marco Tutino vient de faire sensation au Teatro Massimo Bellini de Catane, où il était présenté en diptyque avec La Lupa (La Louve), un opéra en un acte créé à Livourne en 1990, présenté ici en première partie du spectacle. Les livrets des deux œuvres s’inspirent librement de deux nouvelles de deux grands auteurs siciliens, Luigi Pirandello et Giovanni Verga.

La Lupa, scène finale

La Lupa est une nouvelle que Giovanni Verga (1840-1922) avait publiée en 1880 dans le recueil Vita dei campi. Elle met en scène le personnage d’une femme mûre, dévorée par un insatiable besoin d’amour et de sexe, que pour cette raison les gens du village surnomment la louve. Elle séduit un jeune homme et le convainc d’épouser sa fille pour pouvoir l’avoir à sa disposition dans sa propre maison. Le protagoniste est partagé entre son attirance pour la louve qui l’aguiche sans cesse et son désir d’être fidèle à sa femme. Incapable de résister aux avances de la louve, il finit par la tuer. Ce chef-d’œuvre du vérisme est bien connu du public italien. Son succès avait amené Verga a en tirer une pièce de théâtre créé en 1896. Il a également inspiré plusieurs films.

Il beretto a sonagli. 

Il berretto a sonagli est une comédie en deux actes, la dernière des quatre pièces que Luigi Pirandello a écrite dans le dialecte d’Agrigente, sa ville natale, et qui fut créée à Rome en 1917. Le titre fait référence au bonnet à sonnailles porté par le bouffon. Le bonnet de fou est l’aboutissement de deux nouvelles de Pirandello datant de 1912 La verità (La vérité) et Certi obblighi (Certains devoirs), deux textes qui évoquent l’histoire d’un mari qui, se sachant trompé s’accommode, de cette situation à condition que les apparences soient sauvées.

Beatrice Fiorica, née La Bella, a appris que son mari la trompe avec la femme de Ciampa, qui est au service du cavaliere Fiorica comme employé aux écritures. Elle décide de se venger et de provoquer un scandale, elle portera plainte et fera arrêter le couple adultère. Les autres personnages de la pièce tentent de l’en dissuader. Les mœurs siciliennes étaient, du moins à l’époque de l’écriture de la pièce, extrêmement rigides. Les coups de canif dans le contrat de mariage étaient tolérés de la part des hommes, mais devaient rester secrets, et s’ils étaient connus, il fallait sauver les apparences et protéger la façade de l’honneur du mari trompé. Beatrice n’en a cure et convoque le commissaire Spano qui l’incite lui aussi à renoncer à son projet. C’est alors que l’on apprend que Ciampa n’est pas l’employé soumis. Le mari trompé fait chanter la famille en la menaçant de venger son honneur dans le sang. Il faut sauver les apparences coûte que coûte, tous s’unissent contre Beatrice en la déclarant folle. Elle est porteuse du bonnet à sonnailles et ce que raconte une folle ne prête pas à conséquence.

En passant commande à Marco Tutino d’une œuvre nouvelle et en programmant sa représentation couplée à une nouvelle mise en scène de La Lupa, le Teatro Massimo Bellini de Catane a voulu rendre hommage à ces deux géants de la littérature natifs de la Sicile : Verga, le principal représentant du vérisme et Pirandello, le réformateur de la dramaturgie. Cette programmation répond aussi à un objectif politique : le refus de l’omertà mafieuse, le courage de dénoncer, au risque d’un martyre moral, la lutte contre les abus et l’inégalité des sexes sous-tendent la nouvelle création. Dans la même veine, La Lupa stigmatise les crimes sexistes. 

Il berretto a sonagli

Le metteur en scène et scénographe Davide Livermore, ami de longue date du compositeur, a réussi à unifier les deux œuvres que les livrets situent à des époques différentes. D’abord en programmant de mêmes chanteuses dans des rôles parallèles. La mezzo-soprano géorgienne Nino Surguladze joue dans chaque opéra le rôle de la mère indigne, elle est la louve en première partie de la soirée, qui commet le crime infâme de séduire le mari de sa fille, elle est en seconde partie Mme Assunta La Bella, qui abandonne lâchement sa fille en l’accusant d’une prétendue folie. La soprano moldave Irina Lungu incarne la fille de la louve, puis tient le rôle principal de Beatrice. Le ténor espagnol Sergio Escobar chante Nanni Lasca dans La Lupa, pour devenir dans le second opéra Fifi La Bella, le frère de Beatrice. Ensuite Davide Livermore réunit ses décors en les inondant de flots de couleurs créés par les lumières de Gaetano La Mela et les scénographies digitales de D-Wok, une société spécialisée dans la créativité multimédia, les performances interactives, la conception de vidéos et la réalité augmentée.

La Lupa. Scène dans la trattoria

Livermore situe l’action de La Lupa revisitée par le librettiste Giuseppe Di Leva dans un atelier garage des années soixante, dont on ne voit d’abord que les gigantesques portes métalliques surmontées d’une grande inscription en lettres néons majuscules : AUTO. L’ouverture du rideau métallique donne à voir un vaste atelier garage quelque peu décoré à l’occasion d’un anniversaire que l’on y fête. Quelques policiers sont présents, dont Nanni que l’on taquine de ne pas encore s’être marié. Il se justifie en invoquant son trop maigre salaire qui ne lui permet pas de fonder famille. Une pompe à essence, de l’outillage, quelques bidons rouillés, des fauteuils et des chaises disparates meublent les lieux. L’espace scénique est agrandi par un jeu de miroirs situés de part et d’autre de l’avant-scène et par les jeux d’illusion très réussis mis en œuvre par D-Wok. Le second tableau se situe dans la trattoria que la louve a cédée à Nanni pour qu’il puisse épouser sa fille. Les grandes fenêtres vitrées de l’établissement donnent sur une voie de tramways électriques, que l’on voit régulièrement passer. Une grande enseigne signale le non du nouveau propriétaire : Trattoria da Nanni. C’est le prix payé par la louve pour s’offrir les services sexuels de son gendre. En dépit du caractère éhonté de la situation, La Lupa ne se présente pas comme un tribunal d’accusation d’une mère manipulatrice indigne. La nymphomanie de la louve peut trouver son origine dans de graves maltraitances qui l’y ont conduite. Le livret et la mise en scène refusent la dichotomie et pointent le machisme immoral de Nanni. Le tableau final dévie du texte de Verga : Nanni menace sa belle-mère et amante d’un révolver, mais finit par tourner l’arme contre lui-même et se suicide. 


L’action du Berretto a sonagli se situe dans le grand salon des élégants appartements du cavaliere Fiorica, un personnage au centre de l’action dont il est totalement absent. Les costumes de Mariana Fracasso recréent l’atmosphère des années vingt. De grandes baies vitrées dominent majestueusement les toits d’une métropole. Dans cet environnement Davide Livermore a traité les personnages en les faisant jouer comme les poupées d’un théâtre d’ombres en actionnant le jeu des lumières qui en découpent les silhouettes noires sur fond blanc. Les chanteurs sont la plupart du temps de face, en font de scène, comme on le ferait pour un opéra belcantiste, mais avec des accentuations théâtrales caricaturées qui rappellent de loin la commedia dell’arte. Mais il ne s’agit pas ici d’une comédie, on assiste à une progression dramatique de plus en plus intense au cours de laquelle on voit une femme fragilisée acquérir une force morale qui va lui permettre de s’opposer au mensonge sociétal. On est au pays de Sant’ Agata, Sainte Agathe de Catane, l’héroïne d’une passion hagiographique qui subit l’horrible martyre de l’ablation des seins par des tenailles pour s’être consacrée à Dieu et avoir refusé de se marier avec un infâme proconsul romain. Dans l’opéra de Marco Tutino, Beatrice choisit de prendre le parti de la vérité contre celui du mensonge. Ciampa, le trésorier de son mari, se révèle être un chef mafieux qui détient un pouvoir absolu sur les autres personnages de la pièce, dont il s’est acquis l’allégeance en leur rendant des services financiers, les sauvant de situations honteuses qu’ils ne veulent en aucun cas voir dévoilées. Tous, à la suite de Cimpa, conduiront Beatrice au martyre, celui de l’exclusion, en la coiffant du bonnet à sonnailles. Aux tortures physiques subies par Sainte Agathe ou par Sainte Lucie correspond la destruction de la personnalité morale de Beatrice, sauf qu’ici aucun Dieu, si ce n’est le miracle de la musique de Tutino, n’intervient pour la soutenir dans son épreuve et pour l’accueillir en son paradis.

Le nouveau maire de Catane, l’avocat pénaliste Enrico Trantino, qui est aussi président du Teatro Massimo Bellini, avait souligné lors de la conférence de presse de présentation du spectacle que l’opéra, « entre autres, peut servir à s’opposer à la mafia et à l’inégalité entre les sexes. En l’occurrence, la transposition opératique d’un classique du théâtre en prose, Il berretto a sonagli, nous invite à réfléchir, à travers ses personnages, au fait que la réalité est toujours victime de mécanismes où la vérité est instrumentalisée contre le bien et où le mensonge s’arroge le droit à la vérité. La tâche de l’art est aussi, en plus de divertir les citoyens, de poser des questions et de susciter des réflexions sur notre présent ». La dimension politique de l’œuvre de Tutino est patente. En mars 1993 déjà, il avait été l’initiateur du Requiem per le vittime de la mafia (Requiem pour les victimes de la mafia) une œuvre collective de sept compositeurs, dont il avait écrit le morceau final, intitulé Libera me. Il avait écrit à l’époque : « Dire pourquoi est impossible. Pourquoi, après l’explosion d’une bombe, la mort, les images de l’asphalte fracassé, des visages pétrifiés dans le désespoir, un compositeur se sent obligé d’essayer d’atteindre, avec l’expression artistique, cette terre, ces visages, ces morts, c’est quelque chose de vraiment difficile à raconter ».

La musique de Tutino nous fut une découverte grandiose. Elle a une puissance expressive et une sensibilité confondantes qui nous introduisent dans la psyché des personnages, nous font participer à leurs pensées et percevoir le développement mélodramatique des situations. Elle ébranle. À la fois, il est rare qu’une œuvre contemporaine soit aussi facilement accessible et compréhensible au plus grand nombre et soit aussi moderne dans ses innovations tout en s’inscrivant dans la tradition de la grande musique, particulièrement de la musique romantique. Ainsi dans La Lupa trouve-t-on des citations musicales connues qui illuminent un moment le visage des spectateurs et soulagent la tension. Ainsi du toast, du brindisi que porte Nanni Lasca en chantant “Viva il vino spumeggiante (…)” tiré de la Cavalleria Rusticana de Mascagni ou encore de la célèbre chanson napolitaine “Nun è peccato” de Peppino di Capri, qui date de 1958 et confirme le temps de l’action. Des musiques plus récentes, des réminiscences discrètes de jazz ou de hard rock contribuent comme des clins d’œil à l’agrément musical. La musique de Tutino véhicule un profond humanisme et en portant à la scène deux œuvres siciliennes phares rend hommage à la culture de la trinacrie, de l’île aux trois pointes. Les compositions de Marco Tutino ont la force des grandes tragédies, elle font vibrer en nous ce que le spectacle de la violence et des passions mis en scène nous donne à voir et ont le pouvoir libérateur d’une catharis.

Fabrizio Maria Carminati, le directeur artistique du Teatro Massimo Bellini, qui a eu la chance de préparer l’orchestre de Catane en présence du compositeur, présent à toutes les répétitions, et en dialogue avec lui, a dirigé les deux opéras avec une grande maestria. En seconde partie, le chef rend parfaitement bien les intentions de la composition qui veut rendre compte du parcours de croissance morale d’une jeune femme, avec une entame aux airs de comédie suivie d’une montée de la température musicale qui suit le développement dramatique, et une musique au langage de plus en plus sombre et violent. L’excellence de l’interprétation orchestrale a reçu une ovation toute particulière du public.

Le suicide de Nanni

Nino Surguladze dresse avec un talent consommé d’actrice le portrait de cette femme au passé tourmenté, une provocatrice pulpeuse, habillée de noir avec des souliers, un foulard, une ceinture rouges, une couleur qui évoque la passion et le sang. Sa voix chaude et veloutée a des douceurs langoureuses et des profondeurs ensorcelantes. Elle donne une composition très réussie du personnage de la louve, pour se métamorphoser en seconde partie en une tout autre femme et devenir une grande bourgeoise qu’inquiète bien plus sa réputation que le bien-être de sa fille. Excellent acteur lui aussi, le ténor Sergio Escobar se livre à une transformation similaire en passant du rôle d’un campagnard devenu policier, dont le machisme proclamé cache un tempérament bien faible, promu ensuite patron de trattoria, à celui d’un bourgeois dandy profiteur et égoïste. Il donne une puissante interprétation de Nanni avec sa voix bien projetée de ténor doté de beaux graves pour passer ensuite aux afféteries mignardes d’un viveur maniéré. Irina Lungu, plutôt discrète en Mara dans La Lupa, semble s’être réservée pour donner sa pleine mesure en brûlant les planches dans son époustouflante composition de Beatrice en seconde partie. Quelle actrice et quelle interprète ! Elle nous fait suivre la progression morale d’une jeune femme qui choisit de se sacrifier à la vérité plutôt que de se noyer dans les abysses du mensonge. Enfin le grand baryton verdien Alberto Gazale compose un capo mafieux à la dureté inflexible parfaitement odieuse. Il est magnifique dans la présentation des fameuses trois cordes pirandelliennes, que le librettiste Fabio Ceresa a heureusement conservées. Nous sommes tous des marionnettes qui devons être capables de nous accommoder de nos semblables en utilisant selon la situation nos trois cordes : la corde de la civilité dont nous nous servons dans nos rapports quotidiens, la corde sérieuse dont il faut faire usage lorsque la façade se lézarde et qu’il faut parler franc pour trouver un accord, puis, si ces deux cordes s’avèrent inefficaces, reste le recours à la corde folle, où tout est permis, pour rétablir son honneur. C’est là un passage clé du drame, qu’Alberto Gazale rend superbement.

Une grande soirée d’opéra et un défi réussi. La création d’un nouvel opéra est toujours une fameuse gageure, que la vieille amitié qui lie le compositeur, le chef et le metteur en scène a magnifiquement contribué à soutenir.

Luc-Henri ROGER

Distribution du 9 Mars 2024

Chef d’orchestre : Fabrizio Maria Carminati
Mise en scène et décors : Davide Livermore
Costumes de Mariana Fracasso
Scénographie digitale de D-Wok
Nouvelle production du Teatro Massimo Bellini

La Lupa – Musique de Marco Tutino
Mélodrame en un acte et deux scènes d’après le roman de Giovanni Verga sur un livret en vers de Giuseppe Di Leva

La louve Nino Surguladze
Mara Irina Lungu
Nanni Lasca Sergio Escobar
Le Maréchal Vittorio Vitelli

Il berretto a Sonagli – Musique de Marco Tutino
Mélodrame en un acte et deux scènes de la comédie de Luigi Pirandello sur un livret de Fabio Ceresa en création mondiale, une commande du Teatro Massimo Bellini de Catane

Ciampa Alberto Gazale
Mme Beatrice Fiorica Irina Lungu
Mme Assunta La Bella Nino Surguladze
Fifì La Bella Sergio Escobar
Fana Anna Pennisi
Spanò Rocco Cavalluzzi

Crédit photographique © Giacomo Orlando


La Ciociara de Marco Tutino sur Arte Concert

On peut actuellement visionner La Ciociara de Marco Tutino (Cilluffo/Cucchi) donnée au festival de Wexford sur Arte Concert : https://www.arte.tv/fr/videos/116763-000-A/marco-tutino-la-ciociara

Avec 

Jade Phénix (Rosetta)
Leonardo Caimi (Michele)
Devid Cecconi (Giovanni)
Na'ama Goldman (Cesira)
Alexandre Kiechle (Fedor von Bock)

Composition Marco Tutino
Mise en scène Rosette Cucchi
Direction musicale Francesco Cilluffo
Livret Fabio Ceresa, Marco Tutino